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Pénalisation de l’irrégularité: une question préjudicielle en urgence sur l’article L.621-1 du CESEDA (CA Paris, 29 juin 2011, A. Achughbabian)

lunes, 7 de noviembre de 2011

Serge Slama a publié un article intéressant sur l’immigration illégale, qui est reproduite ci-dessous.»Il ne faut pas être dupe, ce qu’essaye de faire le gouvernement français c’est de profiter de cette audience pour vous amener à revenir sur la jurisprudence El Dridi«. C’est en ces mots que Me Patrice Spinosi prendra la parole devant la grande chambre de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) ce 25 octobre 2011 à Luxembourg vers 9h00 pour défendre la dépénalisation du droit des étrangers en réponse à la question préjudicielle posée le 29 juin 2011 par la Cour administrative de Paris. Celle-ci porte sur le point de savoir si la directive 2008/115/CE, du 16 décembre 20081, s’oppose à une réglementation nationale (en l’occurrence l’article L621-1 du CESEDA) prévoyant l’infliction d’une peine d’emprisonnement à un ressortissant d’un pays tiers au seul motif de l’irrégularité de son entrée ou de son séjour sur le territoire national (v. ci-dessous et  C-329/11 Alexandre Achughbabian).

PENALIDAD POR IRREGULARIDAD: CUESTIONE PREJUDICIAL FORMULADA SOBRE LA APLICACIÓN DEL ARTÍCULO 621-1 DEL CESEDA (CORTE DE PARÍS, 29 DE JUNIO, A. ACHUGHBABIAN). Serge Slama ha publicado un interesante artículo sobre la inmigración clandestina que reproducimos un continuación. «No se deje engañar, lo que pretende el gobierno francés es aprovechar esta audiencia para traer de vuelta a la jurisprudencia El Dridi». Con estas palabras Patrice Spinosi hablará ante la Gran Sala del Tribunal de Justicia de la Unión Europea (TJCE) el 25 de octubre de 2011 en Luxemburgo, a las 9:00 para defender la despenalización del derecho de los extranjeros en respuesta a la cuestión prejudicial formulada el 29 de junio de 2011 por el Tribunal Administrativo de París. Esta cuestión se centra en saber si la Directiva 2008/115/CE de 16 de diciembrede 2008, se opone a una reglamentación nacional (en este caso, el artículo L621-1 del Código de Inmigración) que prevea la imposición de cárcel a un nacional de un tercer país por la única razón de la entrada ilegal o permanecer en el país.

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L’avocat aux Conseils insistera aussi sur le fait, en utilisant des statistiques citées par le gouvernement français dans son mémoire  que :

«On vous brandit encore de nombreuses statistiques, dont au demeurant on serait bien en peine de nous dire quelle est leur origine et comment elles ont été obtenues, qui démontreraient que sur les plus de 5000 condamnations prononcées sur le fondement de l’article 621-1 du CESEDA en 2009, seules 597 condamnations l’ont été quand la seule infraction poursuivie était le séjour irrégulier sur le territoire français.

Et l’on vous dit encore que parmi ces 597 condamnations, seules 197 ont donné lieu à une peine d’emprisonnement ferme.

On vous annonce donc froidement qu’en 2009, 197 personnes en France ont été emprisonnées au seul motif qu’ils étaient en situation irrégulière sur le sol français !

On vous annonce donc froidement, qu’en 2009, 597 personnes ont été poursuivies et condamnées en France au seul motif qu’elles étaient en situation irrégulière sur le sol français !»

Peu avant lui, Me Catherine Papazian aura commencé sa plaidoirie en insistant sur le fait que:

«Nous sommes confrontés à un problème de philosophie.

Car c’est bien deux philosophies du droit des étrangers en situation irrégulière qui s’opposent aujourd’hui.

D’un côté, il y a la conception qui a été dégagée par le droit communautaire et en particulier par la directive Retour du 16 décembre 2008.

D’un autre côté, il y a la conception traditionnelle du droit des étrangers française, qui a toujours placé le droit pénal au cœur du mécanisme de reconduite de ceux qui étaient arrêtés en infraction aux règles du séjour»

Car tel est bien le choc des conceptions de l’éloignement des irréguliers qui s’affrontent à l’occasion de cette question préjudicielle.

D’un côté le gouvernement français, soutenu par le gouvernement allemand et estonien, défend le principe même de l’incrimination de l’irrégularité du séjour et la possibilité de placer un sans-papier en garde à vue en faisant peser sur lui l’épée de Damoclès de la comparution immédiate et d’une éventuelle condamnation à de la prison et à une interdiction du territoire français- faisant totalement échapper ces procédures à la directive retour (v. les observations du gouvernement français accessibles provisoirement sur notre scribd) – ou partiellement dès lors que la procédure pénale s’interrompt au cours de la garde à vue pour basculer dans une procédure administrative avec la notification de l’OQTF et de l’arrêt de placement en rétention ou d’assignation à résidence.

De l’autre, les avocats du requérant, qui ont travaillé en liaison avec un groupe de travail associatif, défendent la conception développée par la CJUE dans l’arrêt El Dridi en vertu de laquelle les Etats membres « ne sauraient appliquer une réglementation, fût-elle en matière pénale, susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs poursuivis par une directive et, partant, de priver celle-ci de son effet utile » (point 55 de la décision El Dridi du 28 avril 2011). Or pouvoir placer en garde à vue, poursuivre et mettre en prison un sans-papier pour simple irrégularité du séjour, sans avoir au préalable utilisé l’arsenal de mesures prévues par la directive retour (délai de départ volontaire, assignation à résidence, rétention administrative,  interdiction d’entrée) s’opposent aux objectifs et à la mise en oeuvre de la directive du 16 décembre 2008.

Pour essayer de se départir de la jurisprudence El Dridi, les gouvernements français et allemands essayent de convaincre la Cour que tant que la décision de retour n’a pas été formellement prise, la directive «retour» n’a pas vocation à s’appliquer.

Il prétend que la directive laisserait l’Etat membre libre d’édicter les règles relatives à l’arrestation et à la privation de liberté qui doivent permettre aux autorités d’organiser son départ, sa rétention administrative ou subsidiairement en droit français son assignation à résident.

Or, une telle conception méconnait radicalement la lettre comme l’esprit de la directive en conformité de laquelle elle prétend être.

Ainsi que le démontre très clairement la Commission dans le mémoire qu’elle a présenté devant la Cour – en soutenant la position du requérant – il ne fait pas de doute que le bénéfice des mesures protectrices de la directive a vocation à s’appliquer dès l’arrestation initiale et non comme le prétend l’Etat français au seul moment où une décision de retour a été formalisée.

A cet égard, l’article 2 §1 de la directive prévoit que celle-ci s’applique aux ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un Etat membre. Or, l’article 3 de la directive définit le « séjour irrégulier » comme « la présence sur le territoire d’un Etat membre d’un ressortissant d’un pays tiers qui ne remplit pas ou ne remplit plus les conditions d’entrée énoncées à l’article 5 du Code frontières Schengen ou d’autres conditions d’entrée, de séjour ou de résidence dans cet Etat membre ».

Si les mots ont un sens, c’est donc bien la seule présence de l’étranger sur le territoire qui caractérise le séjour irrégulier, qui entre dans le champ de la directive 2008/115/CE.

Le considérant 5 de la directive précise encore : « la présente directive devrait arrêter un ensemble horizontal de règles applicables à tous les ressortissants de pays tiers qui ne remplissent pas ou ne remplissent plus les conditions d’entrée ou de séjour ou de résidence dans un Etat membre ».

La Commission ne dit pas autre chose lorsqu’elle relève que : « le déclenchement de l’application de la directive est la constatation par une autorité de la présence sur le territoire d’un Etat membre d’un étranger qui ne remplit pas ou plus les conditions d’entrée ou de séjour » (voir les observations de la Commission que nous mettons provisoirement sur notre scribd).

La procédure accélérée a été accordée par ordonnance du 30 septembre 2011. On peut donc espérer la décision assez rapidement.

Nous assisterons à l’audience ce 25 octobre 2011 à 9h00…

NB1 : dans le prochain numéro de l’AJ pénal, Claire Saas reviendra sur cette question du délit d’irrégularité du séjour

NB2 : En Italie, après le séisme El Dridi, un juge de paix de Lecce a décidé de saisir de nouveau la CJUE pour remettre en question le délit d’irrégularité introduit par le « paquet de sécurité » de 2009 sur la base d’un expulsion d’un ressortissant sénégalais («Reato di clandestinità incompatibile» giudice di pace ricorre a Strasburgo)

NB 3: l’arrêt El Dridi est évoqué dans un avis de la CNIL du 16 juin 2011 sur le fichier Gestion des étrangers en situation irrégulière (GESI)

Source: combatsdroitshomme.blog.lemonde.fr